Vous avez dit anthropocène ?
Développement durable ?... La notion est devenue si familière que chacun pense la maîtriser. On la retrouve dans les discours des politiques, dans la stratégie de communication des entreprises, dans nos préoccupations quotidiennes, dans de nombreux programmes scolaires... Et c'est, bien sûr, une très bonne chose. Mais la difficulté à laquelle chacun d'entre nous est confronté de façon de plus en plus aiguë est de trouver le moyen de réactiver et d'entretenir la curiosité et l’intérêt pour l'étude de cette notion. Comment créer l'envie et l’appétence pour l'EDD à une époque où les inquiétudes liées aux conséquences de la crise de 2008 semblent prendre le dessus sur celles liées à la crise climatique, où la majorité des médias cherchent systématiquement à dramatiser sans analyser, où le sentiment d'impuissance a donc de plus en plus tendance à l'emporter sur l'envie d'agir, et où le public a l'impression d'être saturé face à la notion ?
La réponse peut-elle tenir dans un mot : anthropocène ? C'est une piste sérieuse à explorer : le concept n'est pas récent mais sa réactualisation dans les années 2000 rencontre un tel succès qu'il est intéressant de s'interroger. Le terme a été popularisé par Paul Crutzen (prix Nobel de chimie en 1995) - son autobiographie en anglais sur le site des Prix Nobel - , il le propose pour désigner une nouvelle époque géologique qui aurait débuté à la fin du XVIIIe siècle, c'est à dire au moment de la Révolution industrielle. Derrière ce nom, on retrouve tous les grands enjeux de notre temps.
L'étymologie en est relativement simple : « anthropos » c'est l'être humain et « kainos » signifie récent ou nouveau. L'anthropocène c'est donc la « nouvelle période des humains ». L'humain serait donc comparable, en énergie et en universalité, aux plus grandes forces de la Terre. Ou, pour le dire autrement, parmi les influences que subit le système terrestre (et en particulier l'écosphère) il y en a une qui deviendrait prédominante : celle de l'Homme. On voit bien, donc, comment derrière ce terme se retrouvent tous les grands enjeux de l'EDD. L'activité humaine affecterait suffisamment la Terre pour qu'on puisse dire qu'elle traverse un nouvel âge ? Il ne nous revient pas de trancher la question, mais en revanche se la poser et y réfléchir avec nos élèves permet de renouveler les problématiques liées à l'EDD. En effet, se pencher sur l'idée de ce nouvel âge, sur l'affirmation que l'humanité causerait des impacts aux milieux planétaires d'une profondeur telle qu'il faudrait ajouter une nouvelle époque à l'échelle des temps géologique qui succéderait à l'Holocène , c'est réfléchir au fait que l'Homme est face à des choix qui engagent la soutenabilité du développement.
Pour les partisans de cette nouvelle subdivision (ce qui ferait trois époques pour le Quaternaire avec le Pléistocène et l'Holocène), la Terre de ce nouvel âge est une Terre qui se réchauffe, une Terre de surconsommation de quelques uns, une Terre qui se toxifie, qui est déforestée... Selon eux, les conditions favorables de l'Holocène (climats tempérés, humains sur tous les continents qui domestiquent la Terre à des fins alimentaires) qui ont favorisé le développement des civilisations seraient menacées par l'Homme (et toutes ses activités) depuis le début de la révolution industrielle, ce qui bouleverserait l'écosphère terrestre avec une ampleur sans précédent.
Pour vous aider dans vos réflexions sur ces problématiques, vous trouverez réunis ici des contenus scientifiques, des conférences, des entretiens, des documents,des analyses... qui seront régulièrement actualisés
Car l’enjeu est là : restaurer des relations saines entre la planète et l’humain pour ne pas y vivre dans un trop grand mal-être. Par rapport à ces bouleversements (pas tous négatifs) le scientifique ne doit pas être un catastrophiste ni un donneur de leçons mais un donneur d’alarmes optimistes : on voit actuellement des écosystèmes se remettre à fonctionner. Mais il faut s’adapter : moins d'arrogance, un accord avec la nature, le respect de l’autre, le partage. De même, il faut « exploiter » les ressources proches et manger local au lieu de faire venir en hiver les cerises depuis des milliers de kilomètres. Des «valeurs » à base de bon sens à faire partager par les jeunes, avec le risque d’être contrarié par le fascination du virtuel. Voir l'interview video |
Sites internet dédiés |
![]() Bienvenue à l'anthropocène est un site (en langue anglaise) qui vise à améliorer notre compréhension collective du système terrestre. Le site vise à sensibiliser, éduquer et mobiliser les populations sur l'impact de l'humanité sur la Terre . Sa combinaison unique de données scientifiques de haut niveau et des images marquantes aidera les gens à visualiser et mieux comprendre l'empreinte géographique de l'humanité de nos jours . Le site est un projet de collaboration entre les chercheurs et communicants des principaux instituts de recherche scientifique sur la durabilité mondiale . Le Programme international géosphère-biosphère (IGBP) coordonne la recherche internationale sur les interactions à l'échelle mondiale et à l'échelle régionale entre les processus biologiques, chimiques et physiques de la Terre et leurs interactions avec les systèmes humains. |
Les videos ci dessous sont issues du site internet Welcome to the Anthropocene et en langue anglaise |
Laboratory for Anthropogenic Landscape Ecology Le Laboratoire d'écologie du paysage anthropique est un groupe de recherche interdisciplinaire basé à l'Université du Maryland (USA) qui étudie l'écologie et la gestion durable des paysages humains à l'échelle mondiale, régionale et locale. http://ecotope.org/ |
Ressources en ligne
- Paul Crutzen :« Et si l'on manipulait le climat ? " depuis le site de la Recherche.
- Claude Lorius, académicien glaciologue des sciences : « Voyage dans l’Anthropocène », une vidéo en ligne depuis Canal Académie / Les expéditions polaires de Claude Lorius racontées aux lycéens (ibidem). - Une nouvelle ère géologique : l’anthropocène !